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Retour sommaire : "Actualité Concorde"

1er mars 2009 : 40 ans de Concorde à Toulouse

 

La prise de notes et la rédaction de ce petit article m'ayant pris pas mal de temps, merci d'avoir la gentillesse de ne pas réutiliser cette page ou même une toute petite partie sans ma permission.

 

concorde simulateur

 

L'association Cap Avenir Concorde à l'origine de cette journée exceptionnelle, et après 6 mois de préparation, fut récompensée car plus de 5000 visiteurs ont fait le déplacement : une totale réussite.

De nombreuses associations sont venues pretter mains fortes à l'association Cap Avenir Concorde afin d'offrir cette journée de grande qualité et très riche en émotions.

 

Cette manifestation s'est déroulée dans les locaux de l'ancien aérogare de Blagnac, lieu hautement symbolique, puisque l'équipage du tout premier vol Concorde s'y était retrouvé pour animer la conférence de presse d'après-vol.

On retrouve d'ailleurs ci-dessous une photo historique de ce même aérogare avec 2 figures bien connues du monde aéronautique.

 

Photo 1969 suite premier vol Concorde

 

Merci à Airbus d'avoir répondu présent et positivement sur la partie présentation du supersonique F-BVFC (première photo ci-dessus) ainsi qu'aux autorités aéroportuaires pour leur soutien et aides dans l'obtention de toutes les autorisations, le tout ayant contribué au plus grand plaisir du public et des nombreux invités (plus de 80) présents.

 

Les journalistes présents: Yves Marc, Thierry Sentoux et Pierre Sparaco.

Les hommes du développement et des essais: André Turcat, Michel Rétif, Yves Pingret, Dudley Collard, Peter Holding, Jean Rech, Jacques Raulet, Gilbert Correge...

Pour argumenter sur la qualité des conférences de la journée, ajoutons aussi que l'association a réussi à réunir l’équipage complet du dernier vol d’un Concorde d’Air France du 27 juin 2003, non sans oublier la présence d’équipage de British Airways venu spécialement de Londres.

Dans tous ceux que je ne vais pas citer, car il y en a trop, on croisait encore : Les hommes et femmes de la maintenance, les pilotes, copilotes, mécaniciens navigants de BA et d'AF, les stewards et hôtesses de l'air Concorde, les spectateurs du premier vol, le personnel des aéroports au sens large, enfin tous ceux pour qui Concorde sera toujours une passion.

 

Chapitre 1: Développement et essais

 

On sent bien qu'à écouter Turcat le premier vol n'a été qu'une formalité, de par sa grande expérience du delta et que la consigne, qu'il a respectée au sujet de l'atterrissage sans "trop arrondir" à cause d'une tendance hypo sustentatrice redoutée par les ingénieurs, visiblement ne l'inquiétait pas trop.

En gros il dit qu'il aurait pu mieux faire car il se doutait comment ça allait se passer, et comme le toucher des roues était du coup plus sec que prévu il était également plus joli grâce aux poussières de la nouvelles piste fraîchement construite mettant en évidence les jolis vortex, et ce donc dès le premier vol.

 

On ne revient pas sur son vol écourté pour les raisons qu'on connaît, en reanche côté anglais, tout le monde aura apprécié la remarque souvenir suite au bon mot de Trubshaw.

Pour mémoire, après la double panne des radio altimètres et le posé de 002 un peu plus viril que celui de Turcat, on nous rapporte que Trubshaw a dit à son équipage : "Excusez-moi, c'est un arrivage pas un atterrissage !!!"

Monsieur Rétif est une encyclopédie vivante du Concorde, à savoir que tous les systèmes sont bien maîtrisés, on met en valeur son sens pratique et aussi le fait qu'il voit les systèmes sous un autre œil extrêmement intéressant.

Turcat évoque aussi le regret de l'art du radionavigant, du navigateur et du mécanicien, un savoir-faire perdu à bord des avions d'aujourd'hui.

A quoi je rajoute, suite à une conversation avec un pilote Concorde, qu'en cas de soucis de santé du navigant mécanicien, le copilote a la primeur ou "l'angoisse" de passer à sa place, le pilote faisant le reste.

Inutile donc de vous dire que la moindre panne, si mineure soit-elle, peut vite prendre des proportions importantes car tous les pilotes s'accordent à dire que le mécanicien a LA place essentielle sur Concorde, et que cette place est tout sauf de l'improvisation.

Pour revenir à Turcat il confirme le tonneau effectué sur Concorde mais pas par lui.

Il avoue qu'il aurait bien aimé aussi le réaliser mais qu'il a finalement décidé d'emmener son équipe en vol pour les remercier plutôt que de faire cette figure.

Tout au long du discours on parle bien des hommes de l'ombre, moins médiatiques mais capables de faire les vols à la place d'eux à n'importe quel moment.

On aborde aussi les vols ou les équipages sont mélangés entre Français et Anglais.

Les programmes sont divisés mais on sent quand même que de chaque côté on aime bien valider à nouveau à sa manière les essais.

Sont évoqués dans l'ordre: performances, systèmes dégivrage, systèmes carburant, entrées d'air (le gros boulot sur la réussite Concorde), essais grand froid, essais en altitude, essais basse vitesse, etc....

Vient une partie qui directement valide une de mes remarques sur un forum, je jubile : A savoir que la forme de l'aile de Concorde est optimum en vol pour le vol à Mach2.

Le revêtement de l'aile avec l'échauffement ne subit pas les mêmes contraintes de température suivant l'extérieur ou la partie interne de l'aile, donc forcément elle se déforme, mais c'est prévu pour la forme finale en fonction du moment du vol.

C'est d'ailleurs une amélioration sur les avions de série car suite aux mesures sur le proto (petites erreurs entre la théorie et la pratique obligeant une compensation avec les élevons, ce qui veut dire donc de la traînée et une baisse de performances) la chose a été améliorée sur les séries, permettant un vol avec de meilleures performances, l'aile se déforme, c'est prévu et on n'a plus à toucher aux élevons, d'ailleurs ils sont légèrement vers le haut pour une finesse maximale.

 

Le programme Concorde a permis un bond en avant pour l'aéronautique permettant de se placer en bonne place pour des challenges futurs, difficile de chiffrer financièrement le bilan de ces avancées bien réelles pourtant, qui vient contrebalancer des critiques possibles et légitimes sur le prix du programme Concorde.

 

On peut citer:

- Les commandes de vol numériques d'un point de vue aérodynamique

- Commandes de vol électriques coté précisions

- Essais souffleries

- Structure en 3D

- Connaissance sur les problèmes thermiques

- Calculs complexes

- Simulateur de vol

- Combustible et climatisation

- Analyse de sécurité

- Freins carbone

- Calculs de probabilités

- Usinage dans la masse avec raidisseurs intégrés

- Machines à commande numérique

- Apparition des matériaux composites

- Recherche sur les matériaux au sens plus large

- Tests de fatigue

- Freins ABS Etc....

Le tout au service des programmes pour le développement d'avions modernes mais pour d'autres domaines aussi non forcément aéronautiques.

 

Chapitre 2: Maintenance Air France.

 

Je vais faire plus court non pas que le sujet soit moins intéressant mais surtout parce que les intervenants étaient un peu plus stressés.

Bref il en ressort des interventions qu'on ne vient pas sur Concorde par hasard, il faut une réelle motivation car l'avion est exigent à plusieurs point de vues.

D'abord il faut une sérieuse expérience de la maintenance pour être affecté sur Concorde: parce que la quantité de documentations à ingurgiter est très conséquente et bien supérieure aux autres avions, et à cause de ses spécificités.

Ceci étant dit il faut aussi une longue période pour commencer à être à l'aise pour travailler sur l'avion.

Concorde, c'est beaucoup plus d'heures de maintenance par rapport à l'heure de vol, comparativement aux autres avions.

On donne beaucoup sur cet avion mais comme tous les intervenants aiment à le préciser, on reçoit beaucoup en émotions et en satisfaction personnelle ou en équipe sur cet avion.

Tous les techniciens étaient très émus d'avoir eu cette chance de travailler sur le bel oiseau et ont aussi eu un regret ainsi qu'une grande tristesse à l'annonce de la fin des vols, car l'avion selon eux avait encore du potentiel.

Alexandra J. nous racontera une intervention avec une collègue assez douloureuse sur l'avion, comme quoi pour certains il est encore établi que la confiance dans le travail bien fait se limite parfois « à un boulot de mecs » et pas de compétences.

Un avion pour une boucle supersonique pour la maintenance se prépare exactement de la même manière que pour un vol transatlantique.

Les techniciens s'accordent à dire qu'ils trouvaient l'avion extrêmement fiable ainsi qu'intéressant et que tout autre avion à côté est soit banal, soit ressemble plus à une baleine, on devine de suite de quel avion ils veulent parler.

Tous les techniciens ont œuvré pour bichonner le Concorde afin qu'il donne le meilleur de lui même, remarque qui sera reprise et saluée à l'unisson par tous les équipages des Concorde pour le chapitre suivant. Chacun des intervenants racontera également quelques anecdotes durant leur travail sur l'avion.

 

Chapitre 3: Mise en ligne

 

Les anecdotes ne vont pas manquer entre pilotes qui visiblement passent un très bon moment ensemble et ils en font bien profiter l'assistance.

Je connaissais déjà presque toutes les histoires mais je ne boude pas mon plaisir de vous les raconter à nouveau.

 

Concorde décolle pour une boucle avec à bord une bande de fous furieux amoureux de l'avion qui généralement ont cassé leur tirelire pour ce vol.

Rapidement le mécanicien constate un problème de fermeture de valve sur la régulation de la pressurisation en cabine passagers.

Vu que Concorde grimpe très fort, la panne s'annonce assez sérieuse et les passagers forcément vont en prendre plein les oreilles puisque la régulation de pression au niveau des tympans fragiles risque d'être plutôt brutale !

Le mécanicien règle le souci en passant sur une configuration secours mais suffisamment tard pour que les passagers subissent le désagrément assez douloureux alors que durant un vol habituel et sans soucis, Concorde s'avère un modèle de douceur pour les oreilles en raison du fuselage étroit et facile à équilibrer en pression.

(Remarque personnelle : pour la température c'est autre chose si un ou plusieurs groupes de conditionnement viennent à tomber en panne)

Bref, une fois de retour au sol, un passager enthousiaste et ravi de son premier vol supersonique, rencontrant un membre d'équipage déclare juste : "Ah Concorde, magnifique, rien que dans les oreilles, on le sent vraiment que ça n'a rien à voir avec les autres avions !!!"

 

Un autre pilote transportant le petit fils de Lindbergh qui à l'époque avait mis 33h30 pour traverser l'Atlantique, nous raconte qu'au bout de 2 tentatives de décollage (deuxième tentative avec l'avion de réserve) il déclare: "Si ça continue on va réellement mettre plus de temps que Lindbergh pour la traversée !!!"

 

Histoire sur le direct Caracas - Paris.

Au terme de ce vol long, les réservoirs d'équilibrage sont presque à sec (Remarque personnelle, ce qui ne veut pas dire que les réserves réglementaires sont outrepassées, rien à voir).

Bref, il faut préparer l'avion pour l'atterrissage et donc équilibrer l'avion, logiquement on fait à ce stade un transfert de carburant entre les réservoirs avant et arrière.

Que demande le CMD aux passagers dans l'avion à moitié plein ? (je parle de l'avion)

Bien ! il prétexte une coupe de champagne pour transférer les troupes vers la partie de l'avion qui va bien afin de lester l'avion là où il faut.

 

Le dernier pilote Concorde formé et celui donc aussi qui a connu l'aventure la plus courte sur cet avion à son grand regret, nous raconte l'histoire d'une demande en mariage à bord.

 

Les pilotes adorent Concorde, monture très agréable à piloter, aux commandes très précises.

Par contre, ils soulignent qu'autant le simulateur est parfait pour l'apprentissage de cet avion et de ses systèmes, autant pour l'apprentissage de l'atterrissage rien ne vaut le réel car Concorde est un peu ingrat et exigent sur cette phase

Il faut le dompter en le pilotant à l'incidence et à la vitesse précise.

 

Les Anglais marquent leurs différences sur les Français disant qu'ils ont un CMD qui jubile à l'idée de faire tout le vol en manuel alors que les Français (Les Anglais aussi, le CMD cité étant une exception) passent en pilote automatique dès Mach 1.7 voir généralement bien avant !!! Humour so british !.

 

Vient un passage vraiment très intéressant au sujet des différences de formations des pilotes entre AF et BA. Pour un pilote d'AF c'est 20 atterrissages en entraînement.

Chez BA c'est un cycle sur 5 semaines avec épreuves au sol très intenses.

64h de simu et 22 attéros (Vous avez noté, 2 de plus que les Français, ouais, on est meilleur à moins que l'on n'enseigne aux Anglais comment poser encore plus en douceur ???!!!...) et enfin 16 vols de secteurs.

Comme les Anglais ont vraiment de l'humour, ils disent qu'à cause des nuisances pour les tours de pistes normaux ou sur 3 ou 2 réacteurs, ceux-ci se font en Écosse et au Portugal, et quand ça fait vraiment trop de bruit, ils viennent en France à Châteauroux !!! (J'adore)

 

Les pilotes mettent tous en avant le travail majeur du mécanicien navigant sur Concorde, ils remercient également le travail de leurs techniciens, j'en ai déjà parlé, car ils ont une entière confiance en eux sur le travail réalisé, à chaque fois qu'ils partent avec un Concorde.

 

Chapitre 4 : Concorde, un service d'excellence.

 

Stewards et hôtesses se succèdent au micro pour quelques anecdotes sur les passagers, mais pas trop non plus malgré les encouragements et l'insistance de l'animateur pour obtenir quelques noms de stars avec leurs habitudes.

J'ai noté que le droit du silence sur les passagers était de mise à Air France même si on a eu quelques noms cités, ce que personnellement je trouve très bien.

Vient alors un moment particulier que j'ai bien aimé aussi où les intervenants ont parlé de la grande famille Concorde et des liens entre eux.

Ils expliquent cette « famille » par le fait que Concorde, pas trop grand, a cette dimension humaine.

Ainsi les équipages se connaissent bien, s'apprécient pendant et en dehors du travail mais surtout ont la possibilité de mieux connaître les passagers ou de savoir quand il faut s'effacer.

Le passage sur avions plus gros, comme le B747, est douloureux pour certains car le service de masse, avec un équipage trop ou pas assez nombreux, fait qu'à s'occuper de trop de monde avec l'aide de collègues aussi trop nombreux (même si c'est une nécessité) on finit par n'avoir de relation avec plus personne.

Autant avec les collègues donc qu'avec les passagers habitués finalement.

 

La coupure suite au crash de Concorde a été une grande douleur pour ce que l'on sait (Petit silence dans la salle tout à propos, pas de commentaire à faire) mais aussi sur le fait qu'il a fallu se résoudre à passer sur un service moins d'excellence et plus de masse, donc moins soigné ou attentionné au final.

Cette coupure explique aussi le passage des clients fortunés et habitués vers les jets d'affaires, cette clientèle était donc alors perdue.

Mais les intervenants notent également qu'à la reprise des vols Concorde une grande partie de cette catégorie de passagers revient vers Concorde pour le plus grand plaisir des stewards et hôtesses mais aussi des passagers.

Concorde rappelle un peu la Caravelle pour certains équipages, un avion où il était possible d'avoir un service aux petits soins car le nombre de passagers était encore à dimension humaine comme je le disais plus haut.

 

Les menus d'exceptions sont cités sans trop m'impressionner car ce point m'intéresse vraiment peu, même si je le sais extraordinairement important pour détendre le passager, lui rendre le voyage agréable et du coup éviter un travail supplémentaire, plus psychologique on va dire.

Ce domaine psychologique et formation du personnel Concorde aurait mérité d'être un peu plus développé, car tout ce personnel de bord parle beaucoup de langues, sait rapidement s'occuper des passagers de la manière qu'il faut, connait les consignes pour gérer les éventuels incidents afin de ne pas donner une charge supplémentaire à ceux qui sont tout à l'avant, et enfin assure la sécurité et e le confort de tous.

 

J'ai oublié aussi le fait qu'ils sont l'image de marque de la compagnie qu'ils représentent.

Une petite chose m'a surpris, j'ai eu l'impression tout au long des discours que même à la retraite la hiérarchie était toujours bien présente et qu'il y a avait encore un profond respect pour son supérieur, c'est rare et mérite d'être souligné.

Chacun à sa place en parfait professionnel c'est comme ça que ça fonctionne le mieux.

J'avoue non objectivement que même s'il y avait énormément de choses intéressantes à apprendre de ces personnes attachantes, cette partie est celle qui m'a le moins intéressé, tout simplement parce que j'adore la technique sur Concorde : ses performances.

C'est le boulot tout à l'avant qui me passionne avant tout avec la ligne de l'oiseau qui me font rêver.

 

J'ai eu la chance d'échanger quelques mots avec Turcat au sujet du Nord 1500 Griffon, avion lui aussi exceptionnel avec un réacteur classique plus un statoréacteur, la grande époque des prototypes qui plaçaient la France sur le devant de la scène.

Si vous avez envie de mieux connaître Turcat , pas uniquement comme l'homme du Concorde, je vous invite à lire le formidable livre sur le Gerfaut et le Griffon, vous apprendrez beaucoup de choses sur lui, car les 2 avions évoqués il les pilotait seul.

J'ai également eu le loisir d'approcher tous ceux à qui j'avais envie de poser des questions, je remercie donc sincèrement les organisateurs pour cette grande fête autour de Concorde, fête vraiment très réussie.

 

FrançoisS

 

Votre serviteur, très attentif, durant les nombreuses conférences.

concorde simulateur

 

 

Rédaction 03/03/2009 et mis en ligne sur mon nouveau site début 2011

 

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